Dieu et César, Dieu ou César? (2) - Forum protestant

Dieu et César, Dieu ou César? (2)

«La relation du christianisme à l’État est celle d’une sacralisation désacralisante»: après avoir dans la première partie de cet article montré l’ambivalence des sources bibliques et l’une des extrémités du spectre théologico-politique incarnée par Hobbes, Adrien Boniteau va voir ce qui se passe à l’autre extrémité avec Tolstoï. Avant de trouver dans Pascal, une pensée qui «tente de concilier les thèses de l’anarchisme chrétien et de l’étatisme théologique pour mieux les dépasser».

Deuxième partie de l’article publié dans Foi&Vie 2022/2.

Lire la première partie sur notre site.

 

2. L’anarchisme chrétien: Dieu contre César

La première solution pour résoudre le problème théologico-politique du christianisme revient donc à écarter le principe pétrinien en associant Dieu et César, c’est à dire en faisant de César le seul et unique représentant de Dieu sur terre. Cela permet de postuler que nul ne peut obéir à Dieu s’il n’obéit à l’État. Le principe paulinien devient ainsi absolu. Une autre solution, qui se place cette fois-ci à l’autre extrémité du spectre théologico-politique, l’anarchisme chrétien (1), consiste à nuancer fortement le principe paulinien et à orienter le principe pétrinien dans une orientation des plus radicales. Si César n’est rien ou, pire, si César est le représentant terrestre du mal, une puissance diabolique, alors il convient de lui résister si l’on désire être fidèle à Dieu. Alors que Hobbes choisit de réduire les essentialia au strict minimum de «Jésus est le Christ» et à classer toute autre considération parmi les adiaphora, les anarchistes chrétiens et la critique théologique de l’État ont tendance à étendre au maximum le champ des essentialia. Pour être un chrétien authentique, il ne suffit pas de croire en certains dogmes et de pratiquer sa religion: il convient également, et surtout, d’étendre le christianisme à l’économie, la société et la politique. La conversion personnelle doit in fine se traduire par une révolution politique ou sociale. Alors que Hobbes défend une sorte de minimalisme dogmatique, les anarchistes chrétiens théorisent un christianisme maximaliste susceptible d’être non seulement spirituel, mais également social et politique.

L’anarchisme chrétien recouvre une multitude de courants divergents et parfois opposés. Thomas Müntzer et le mouvement paysan, les anabaptistes de Münster, divers courants millénaristes médiévaux, le courant de la Cinquième Monarchie lors de la Révolution anglaise prônent une révolution violente qui aboutirait à l’abolition de toutes les autorités politiques, marquées par le péché et prétendant régner à la place de Dieu. La prégnance de l’eschatologie est caractéristique de ces mouvements. Le retour du Christ est proche, le Fils de Dieu instaurera un règne de mille ans durant lesquels il dirigera les hommes (Apocalypse 20,2-6). Par conséquent, abolir les autorités politiques existantes revient à préparer la venue du Christ. Ici, les élus, les chrétiens authentiques, ont la charge d’accomplir le jugement divin vis à vis des oppresseurs. Ils sont le bras armé du Dieu qui détruit les systèmes politiques terrestres et leurs représentants (Apocalypse 19,11-21). Leur victoire contre les grands du monde instaure l’avènement du millénium. La rédemption s’accomplit donc par le sang, non plus par le sang du Christ sauveur (l’âge de la grâce prend fin, celui du jugement commence), mais par le sang impie versé par Dieu dans sa colère. La violence et la révolution sont ainsi sacralisées. Elles sont le prélude nécessaire à une ère de paix, d’amour et de communion, une ère de réconciliation après la longue période de division succédant à la chute. Le loup mangera alors avec l’agneau (Ésaïe 11,6-9), le Messie règnera (Ésaïe 11,10, Apocalypse 20,4-6) et Dieu sera «tout en tous» (1 Corinthiens 15,28). La violence paroxystique de la révolution messianique se voit donc justifiée en ce qu’il s’agit d’une violence rédemptrice, inaugurant une ère de paix et de communion éternelles.

Mais à ces mouvements violents s’oppose une autre tendance de l’anarchisme chrétien, non violente. Les anabaptistes non-violents (les futurs mennonites), les quakers lors de la Révolution anglaise, qui refusent de saluer les magistrats au motif que Dieu seul règne sur les hommes, ou, pour la période contemporaine, des figures telles que Léon Tolstoï ou Jacques Ellul refusent à la fois la violence étatique et la violence révolutionnaire. Le Christ n’a appelé les hommes ni à juger d’autres hommes (Matthieu 7,1), ni à exercer la violence, pour quelque cause que ce soit (Matthieu 5,38-39 et 26,52). Par conséquent, le chrétien doit s’abstenir de participer autant à la violence étatique qu’à la violence révolutionnaire. Tolstoï fustige ainsi conjointement l’État et les successeurs sécularisés des millénaristes violents, les anarchistes révolutionnaires et les communistes marxistes:

«Les socialistes, les communistes, les anarchistes, avec leurs bombes, leurs émeutes, leurs révolutions, sont loin d’être aussi dangereux pour les États que ces hommes isolés, qui proclament de tous côtés leurs refus en se basant sur la même doctrine connue de tous. Tout État sait comment et avec quoi se défendre contre les révolutionnaires; aussi ne craint-il pas ses ennemis extérieurs. Mais que peut-il faire contre les hommes qui démontrent l’inutilité et même le mal de toute autorité, qui ne combattent pas l’État, mais simplement l’ignorent, peuvent s’en passer, et, par conséquent, refusent d’y participer.

Les révolutionnaires disent: «L’organisation sociale actuelle pèche par cela et par cela qu’il faudrait supprimer et remplacer par ceci et ceci». Le chrétien, lui, dit: «Je ne m’occupe pas de l’organisation sociale, j’ignore si elle est bonne ou mauvaise, et je ne veux pas la détruire, précisément parce que je ne sais pas si elle est bonne ou mauvaise; mais, pour le même motif, je ne veux pas non plus la soutenir; et non seulement je ne le veux pas, mais je ne le peux pas, parce que ce qu’on me demande est contraire à ma conscience». Or, toutes les obligations du citoyen sont contraires à la conscience du chrétien, et le serment, et les impôts, et la justice, et l’armée; et ce sont sur ces obligations que se base tout le pouvoir de l’État. Les ennemis révolutionnaires luttent extérieurement contre l’État, tandis que les chrétiens, sans lutte, détruisent intérieurement tous les principes sur lesquels est basé l’État.» (2)

Tolstoï reproche aux révolutionnaires de s’étatiser, pour ainsi dire, c’est à dire d’utiliser les propres armes de l’État, dont la violence, contre l’État. Que recherchent les révolutionnaires sinon de revendiquer pour eux-mêmes le «monopole de la violence physique légitime» (Weber) détenu par l’État? D’après Tolstoï, voir dans la violence révolutionnaire une violence légitime contre la violence jugée illégitime de l’État revient à tomber dans le piège tendu par l’État. C’est se constituer en un contre-État et s’approprier une violence étatiste, car considérée comme seule légitime, contre l’État. En réalité, les révolutionnaires partagent toutes les caractéristiques de l’État, c’est à dire l’usage de la violence et la prétention à un idéal que seule la violence pourrait faire triompher. Ils ne sont donc pas à strictement parler les ennemis de l’État, mais son double inversé.

Tolstoï propose quant à lui une démarche alternative. Plutôt que la révolution, l’écrivain russe choisit la subversion. Le chrétien doit chercher non pas à détruire l’État en ayant recours à la violence, mais à refuser de participer à toute activité étatique au nom de ses convictions. La loi qui régit le fonctionnement étatique, celle du «monopole de la violence physique légitime», est en tous points opposée à la loi qui régit le christianisme, celle de l’amour (Matthieu 22,37-40). En somme, Tolstoï oppose l’éthique au politique. Si le politique se caractérise, ainsi que l’a défini Carl Schmitt, comme «la discrimination de l’ami et de l’ennemi» (3), alors l’éthique chrétienne doit être perçue comme une subversion du politique: Jésus n’a-t-il pas explicitement demandé de bénir les ennemis et de les respecter autant que des amis (Mathieu 5,44)? Pour Tolstoï, le martyr chrétien, qui répond à la violence de ses bourreaux par l’amour, démontre l’injustice et l’illégitimité de la violence étatique de façon beaucoup plus évidente que les pratiques violentes des révolutionnaires, qui conduisent en retour l’État à formuler une réponse violente contre ceux qui se sont autoproclamés ses ennemis. Alors que les idéologies et les pratiques révolutionnaires sont alléguées par les partisans de l’ordre pour justifier l’idéologie étatiste et le recours à la violence par l’État, le discours chrétien, lui, constitue la seule véritable subversion de l’État:

«Le christianisme dans sa véritable signification détruit l’État. C’est ainsi qu’il fut compris dès le début et c’est pourquoi le Christ a été crucifié. Il a été compris ainsi de tout temps par les hommes que ne liait pas la nécessité de justifier l’État chrétien. Ce n’est qu’à partir du moment où les chefs d’État ont accepté le christianisme nominal extérieur qu’on a commencé à inventer les théories subtiles d’après lesquelles on peut concilier le christianisme avec l’État. Mais, pour tout homme sincère de notre époque, il ne peut pas ne pas être évident que le véritable christianisme – la doctrine du pardon, de l’amour – ne peut pas se concilier avec l’État, son despotisme, sa violence, sa justice cruelle et ses guerres. Non seulement le véritable christianisme ne permet pas de reconnaître l’État, mais il en détruit les principes mêmes» (4).

Au-delà de leurs divergences, les anarchistes chrétiens, qu’ils soient ou non violents, ont généralement tendance à présenter la seigneurie de Dieu comme exclusive de toute autre seigneurie temporelle. «Nul ne peut servir deux maîtres» (Matthieu 6,24) et, comme Dieu est considéré comme «le roi de toute la terre» (Psaume 47,8), le chrétien doit se soumettre à son divin roi plutôt qu’à l’État terrestre. Dès lors, le conflit entre les sphères temporelles et spirituelles, que Hobbes résout radicalement en faisant du pouvoir temporel la seule autorité spirituelle véritable, est ici également tranché de façon non moins radicale, puisque l’autorité spirituelle, Dieu lui-même, se constitue en un pouvoir temporel. Puisque seul Dieu règne sur terre, le pouvoir est écarté des mains des hommes: théocratie et anarchie sont donc indissociables.

 

3. Entre deux extrêmes: théologies centristes

Entre les deux extrêmes d’une théologie de l’obéissance absolue à l’État et d’une théologie du rejet absolu de l’État, il existe une infinité de nuances et de possibilités. Il m’est impossible de présenter, dans les limites de cet écrit, une liste exhaustive de ces différentes propositions. Je me contenterai d’en présenter brièvement quelques-unes qui me paraissent pertinentes.

Une conciliation intéressante, car paradoxale, de l’étatisme théologique et de l’anarchisme chrétien est donnée par Blaise Pascal. Plutôt que d’établir un compromis entre les deux extrémités du spectre théologico-politique, Pascal tente de les faire tenir côte à côte et de concilier l’inconciliable. La théologie politique de Pascal pourrait être définie comme dialectique. D’un côté, Pascal cherche à relativiser toutes les pratiques et les institutions humaines, qui ne sont ni justes ni légitimes en soi. Si Dieu est absolu, alors il convient de critiquer toutes les choses qui relèvent de la sphère temporelle et qui sont, de ce fait, forcément relatives. Dès lors, aucun pouvoir politique ne peut prétendre être fondé sur l’approbation de Dieu, sur la justice – car seule la justice divine peut être dite juste – ou sur une potentielle loi naturelle – car celle-ci, si elle existe, est loin d’être un absolu, puisque la nature est marquée, depuis la chute, par le péché –. La légitimité de l’État et des institutions politiques ne se fonde en réalité que sur la coutume. Les hommes respectent l’État uniquement parce que l’obéissance au souverain est devenue une habitude à force de perdurer et de se transmettre. Pascal se fait ici censeur de tout État qui prétendrait servir Dieu, garantir la justice ou le bien de ses administrés. Il s’agit de briser l’idole qu’est «le fondement mystique de [l’]autorité» (5). Pour le philosophe janséniste, l’État ne peut prétendre à aucune légitimité. Cette idée le rend indéniablement proche des anarchistes chrétiens.

Pour autant, Pascal se garde bien d’inciter les chrétiens à la rébellion. Son penchant conservateur le pousse à redouter plus que toute autre chose la révolution, voire même le changement social. En conformité avec l’augustinisme politique dont il se revendique, il voit dans l’anarchie et le désordre un mal plus grand que l’ordre illégitime de l’État. L’homme étant marqué par le péché originel, l’État demeure un moindre mal, un moyen de limiter les conséquences néfastes du péché. Pascal paraît ici assez proche de la conception hobbesienne: vivre sans État reviendrait à vivre en situation de guerre civile. C’est ainsi que, dans le même texte, le philosophe déclare que, «pour le bien des hommes, il faut souvent les piper» (6). Il est dans l’avantage du souverain et du peuple lui-même de tromper ce dernier sur la nature du pouvoir. Il vaut mieux ne pas lui révéler l’absence de légitimité de l’État. Ce paradoxe de la pensée théologico-politique pascalienne peut probablement s’expliquer ainsi: il faut refuser conjointement l’idole de l’État et l’idole de la révolution. Pascal démystifie l’État de manière radicale, mais il refuse également de mystifier la révolution. Le chrétien ne doit placer son espoir ni dans l’État, ni dans la révolution: seul Dieu mérite sa confiance.

Mais si Pascal tente de concilier les thèses de l’anarchisme chrétien et de l’étatisme théologique pour mieux les dépasser, il n’en demeure pas moins une exception. La plupart des théologiens du politique envisagent non une conciliation, mais un compromis. Le principe paulinien et le principe pétrinien peuvent être conciliés de différentes façons. L’on peut postuler une supériorité de l’autorité spirituelle, représentée dans la théologie catholique par le pape, sur l’autorité temporelle. Le représentant de l’autorité spirituelle déléguerait en réalité l’autorité temporelle aux différents souverains, et l’autorité temporelle découlerait de l’autorité spirituelle. Dans ce cas, le politique est encastré dans le religieux, l’État est envisagé comme le serviteur de l’Église. C’est une telle conception qu’adopte le pape Boniface VIII dans la bulle Unam Sanctam (1302). Il semblerait également que le théologien catholique contemporain William Cavanaugh, associé à la Radical Orthodoxy, semble reprendre cette idée, tout en la modernisant. Il critique en effet plus l’État moderne, désencastré de l’Église et prétendant être au-dessus de celle-ci, que le pouvoir politique en général (7).

Une autre manière de concilier le principe pétrinien et le principe paulinien revient à interpréter le passage de Romains 13 en un sens étendu. C’est la démarche proposée par les auteurs monarchomaques (Théodore de Bèze, François Hotman, Philippe Duplessis-Mornay…). D’après eux, s’«il n’y a d’autorité que par Dieu» (Romains 13,1), cela revient à dire que les autorités inférieures sont aussi légitimes que les autorités supérieures aux yeux de Dieu. Par conséquent, l’on peut envisager une résistance des «magistrats inférieurs» contre les «magistrats supérieurs» sans déroger au principe paulinien. Dès lors, le sujet peut inciter les magistrats inférieurs à prendre les armes contre les magistrats supérieurs. Les principes pauliniens et pétriniens sont ainsi conciliés en postulant que les magistrats inférieurs peuvent désobéir aux magistrats supérieurs si ceux-ci deviennent tyranniques ou méprisent Dieu.

Conclusion: le théologico-politique comme dialectique

La pensée théologico-politique se décline ainsi en une multitude de positions allant du respect absolu de l’autorité étatique au rejet non moins absolu de l’État. Certes, les deux pôles de l’étatisme théologique et de l’anarchisme chrétien tendent, par leur simplicité radicale, à paraître les plus cohérents. De fait, «dans sa tension constitutive, le théologico-politique a toujours pour horizon, jamais atteint, l’absorption (et pas seulement la subordination) d’un terme par l’autre» (8). Il n’en reste pas moins qu’une infinité de combinaisons entre ces deux termes, le théologique et le politique, demeure théoriquement envisageable. Cette multiplicité témoigne, dans sa profusion, de l’impossibilité pour la pensée politique chrétienne d’atteindre un équilibre définitif entre ses deux pôles et dévoile la tension constitutive qui la traverse.

La réflexion politique proposée par le christianisme est donc beaucoup moins monolithique qu’on l’entend parfois. La thèse d’un christianisme qui serait par essence conservateur quant au pouvoir doit être réfutée. La pensée théologico-politique révèle plutôt une profonde ambiguïté, une faille que vingt siècles d’histoire du christianisme ne sont pas parvenus à combler. Dès lors, au lieu d’interpréter le spectre théologico-politique que nous avons mis en évidence comme une donnée statique, il convient bien plutôt de mettre en avant son caractère dynamique, paradoxal et, surtout, dialectique. La théologie politique repose en effet sur une dialectique du royaume des hommes et du royaume de Dieu. De fait, les «logiques du théologico-politique chrétien sont dépendantes d’une dialectique de ces rapports, qui tantôt oppose la cité terrestre à la cité de Dieu, tantôt établit un rapport d’analogie ou de ressemblance entre les deux» (9). La relation du christianisme à l’État est celle d’une sacralisation désacralisante, à l’image de la théologie politique de Pascal. Si César, lieutenant de Dieu sur terre, tient de lui son pouvoir, dès lors revêtu d’une légitimité quasi-divine, il n’en reste pas moins que la majesté de Dieu est toujours susceptible de relativiser voire de nier son autorité, car donner «toute royauté à Dieu, c’est la retirer aux hommes» (10). Le rapport du christianisme au pouvoir est donc dialectique. Le théologico-politique est une paradoxale force de légitimation subversive pour l’État.

 

Illustration: portrait de Léon Tolstoï par Ants Laikmaa (1904, Eesti Kunstimuuseum, Tallinn).

(1) Je prends le terme dans un sens délibérément étendu. À strictement parler, on ne peut qualifier d’anarchistes chrétiens que les auteurs chrétiens des 19e-20e siècles critiquant l’État (Tolstoï, Ellul, etc.). Mais j’inclus ici dans cette classification l’ensemble des auteurs ou des mouvements ayant prôné un rejet de l’État, voire dans certains cas un appel à la révolution, toutes époques confondues. Sont ainsi susceptibles d’être inclus sous ce terme (certes anachronique!) les divers mouvements messianiques médiévaux (voir Norman Cohn, The Pursuit of the Millennium. Revolutionary Millenarians and Mystical Anarchists of the Middle Ages, Pimlico, 2004 (1957)), Thomas Müntzer et le mouvement paysan allemand (voir Thomas Müntzer, Christianisme et révolution. Écrits théologiques et politiques, traduction de Joël Lefebvre, édité par Johann Chapoutot et Éric Vuillard, Presses Universitaires de Lyon, 2021 (1982); Marianne Schaub, Müntzer contre Luther. Le droit divin contre l’absolutisme princier, À l’enseigne de l’arbre verdoyant, 1984) et plus généralement la Réforme radicale (voir George Huntston Williams, The Radical Reformation, Westminster Press, 1962), ou encore certains mouvements issus de la révolution anglaise (voir Olivier Lutaud, Cromwell, les Niveleurs et la République, Aubier-Montaigne, 1978).

(2) Léon Tolstoï, Le royaume des cieux est en vous, traduction d’Ely Halpérine-Kaminsky (modifiée par Alain Refalo), Passager Clandestin, 2015, pp.107-108.

(3) Carl Schmitt, La notion de politique, traduction Marie-Louise Steinhauser, Flammarion, 1992, p.64.

(4) Tolstoï, Royaume des cieux, op.cit., p.112.

(5) Blaise Pascal, Pensées, édition par Michel Le Guern, Gallimard, 2004, p.87.

(6) Ibid., p.88. NDLR : selon le dictionnaire de Furetière, piper signifie «tromper, et particulierement au jeu».

(7) Le pouvoir politique est ainsi envisagé dans le cadre de l’Église ou, du moins, de sa conception du monde. Le pouvoir politique ne doit pas équivaloir à l’Église (qui propose une politique alternative à celle de l’État), mais il doit néanmoins servir celle-ci: «Si le Christ est réellement l’accomplissement de l’histoire du salut commencée en Israël, alors Dieu doit [pouvoir] passer par les autorités gouvernementales pour parvenir à son propre dessein d’un nouvel ordre social. Néanmoins, le gouvernement n’est pas l’Église; l’Église existe pour servir de témoin distinct, pour rappeler au gouvernement son statut provisoire. En tant que dirigeant, le dirigeant est destiné à juger; en tant que membre de l’Église, le dirigeant est appelé à juger avec clémence; et l’Église doit ici signaler la tension inhérente entre les deux obligations» (William Cavanaugh, Migrations du sacré. Théologies de l’État et de l’Église, traduction d’Anne Fouques Duparc, Éric Iborra et Denis Sureau, L’Homme Nouveau, 2010, pp.172-173). Cavanaugh ne paraît pas rejeter le pouvoir politique (il dénonce seulement l’État moderne), à la différence des anarchistes chrétiens, mais il demande sa soumission à l’Église. Sur ce point, il semble assez proche des positions de la bulle Unam Sanctam.

(8) Vincent Delecroix, Apocalypse du politique, Desclée de Brouwer, 2016, p.26.

(9) Ibid., p.35.

(10) Ibid., p.49.

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