Quels protestantismes au 21e siècle ?
Une «idée dangereuse» qui est le mode de christianisme de près de 4 chrétiens sur 10 (chrétiens qui sont eux-mêmes environ 3 humains sur 10) et qui est aujourd’hui très minoritairement européenne. En introduction à un dossier de Foi&Vie sur l’état actuel des protestantismes, l’occasion de s’interroger sur cette doctrine simple, cette pratique compliquée et son mode de gouvernance concurrentiel qui est une de ses spécificités en christianisme.
Liminaire du dossier de Foi&Vie 2023/3.
Un demi millénaire, et après ?
Il n’était pas écrit que la très grande variété d’Églises issues des ruptures du 16e siècle au sein du christianisme romain constitue aujourd’hui un ensemble qui, de quelque façon qu’on l’appelle, pourrait devenir un jour majoritaire au sein du christianisme tout court. Christianisme qui, rappelons-le, ne s’effondre pas du tout mais devrait continuer à être la religion d’environ trois êtres humains sur dix dans l’avenir prévisible (1).
Car ce mode de christianisme, s’il reste mineur mais stable en France (les apports de l’immigration et de la conversion compensant les pertes de la faible transmission), connaît depuis le 20e siècle une forte expansion au niveau mondial qui l’a fait quelque peu changer de visage. Issu d’Europe, il est aujourd’hui déjà très minoritairement européen (13% des protestants habitent ce continent contre 37% l’Afrique subsaharienne, 33% l’Amérique et 17% l’Asie-Pacifique (2)) et les traditions jusque là dominantes comme les Églises réformées et presbytériennes, luthériennes, anglicanes et méthodistes, baptistes, ne sont aujourd’hui le plus souvent que de simples cadres institutionnels abritant une multitude de configurations ecclésiales confrontées à une autre multitude d’Églises à l’institutionnalisation plus récente ou plus souple encore mais dont la théologie, lorsqu’on la creuse un peu, est malgré les apparences extrêmement semblable (si les institutionnels ont par nature un peu de mal à dialoguer, on peut d’ailleurs constater que les théologiens chrétiens, y-compris catholiques, ont aujourd’hui une grande facilité à le faire).
On peut se demander pourquoi consacrer un dossier spécifique à ces évolutions dans Foi&Vie puisqu’après tout, une bonne partie du contenu de cette revue a toujours consisté à tenter de les suivre. Raison pour laquelle nous signalons ci-dessous les articles parus depuis 2020 dans nos pages et qui auraient eu toute leur place dans ce dossier puisqu’ils traitaient de problématiques extrêmement actuelles et déterminantes pour l’avenir des protestantismes comme le ministère féminin ou l’Église en ligne. C’est que leur foi et cette manière particulière qu’ils ont de la pratiquer et de l’exprimer dans cet espace vague, peu organisé, peu structuré, localiste et concurrentiel est à peu près la seule chose que les protestants ont en commun et qui les différencie du reste de l’humanité. Il est donc utile de temps en temps d’examiner justement ce dénominateur (si peu dénominationnel) commun étant donné qu’il n’y a aucun autre domaine où l’on peut parler raisonnablement des protestants comme d’un ensemble pensant vaguement la même chose ou agissant de manière à peu près semblable.
La forme: comment nous appelons-nous ?
Ce mode de christianisme a aussi ceci de particulier qu’il n’a jamais vraiment réussi à trouver un nom consensuel pour se désigner. Nous disons ici protestantisme mais c’est un terme qui a été d’abord plus utilisé par des personnes hostiles comme Bossuet que par les membres de ces Églises. C’est aussi un terme plus utilisé en français que dans les autres langues mais, même en français, il souffre actuellement de la concurrence du terme évangélisme qui a tout autant sinon plus de titres à désigner l’ensemble même si cela flatte notre propension à la scissiparité qu’il n’en désigne qu’une partie. Nous avons donc ici titré Quels protestantismes car il faut bien choisir un terme et que c’est celui qui sera le mieux compris par un lectorat francophone, mais il ne doit être pris ni comme une affirmation ni comme une limitation et le pluriel n’est pas qu’un effet de mode: il signifie la pluralité inhérente à ce mode-là qui, s’il est appelé protestant, ne peut être que protestants.
Mais si par ici l’appellation protestantisme ne convient pas à qui se dit évangélique et l’appellation évangélisme ne convient pas à qui se dit protestant, comment faire (3) ? On peut tenter de sortir de ce piège formel en passant par le fond (que nous abordons plus bas). Du côté détaillé, il faudrait alors appeler cela le christianisme biblique non-sacerdotal et concurrentiel (ou non-territorial) … mais c’est un peu long. Du côté synthétique, on se contenterait tout simplement de christianisme, en risquant de se mêler avec un catholicisme et des orthodoxies (et même des Témoins de Jéhovah) assez éloignés théologiquement et qui définissent en creux ce qu’est cet autre christianisme qui n’est pas seulement le reste du christianisme.
Car à part christianisme, toute appellation simple se révélera soit fausse soit biaisée. Il faut s’y résoudre: les catholiques ne représentent pas toute l’Église, les orthodoxes sont les seuls à trouver leur doctrine droite (et s’accusent régulièrement entre eux de l’avoir tordue) et les autres que nous sommes en grande partie ni ne protestons par nature ni ne sommes les seuls à proclamer l’Évangile ou à bénéficier des effets de la Pentecôte.
Que l’on se fasse appeler protestant, évangélique, réformé, baptiste, méthodiste, ou pentecôtiste, on trouvera sous chacun de ces parapluies troués des Églises de toutes sortes et dont on pourra repérer les équivalents sous les autres parapluies. Seuls les luthériens et anglicans ont gardé grâce à leur institutionnalisation plus poussée un semblant d’unité plus stylistique que doctrinale mais qui, comme toute institutionnalisation aujourd’hui, prend eau de tous côtés. Sauf que …
Le fond: y a-t-il une doctrine protestante ?
Sauf que trois traits permettent de mettre toutes ces Églises protestantes, évangéliques, pentecôtistes et indépendantes dans le même sac: la Bible comme juge de paix (de quelque façon qu’on l’interprète ou que l’on soupèse ses affirmations souvent contradictoires), le salut par la grâce qui désacralise toute médiation humaine et entraîne le sacerdoce universel (clé de l’accès croissant et récent des femmes au pastorat), enfin la concurrence interne non seulement entre Églises mais entre communautés locales (depuis le 19e siècle et la fin des hégémonies ecclésiastiques héritées de la Réforme magistérielle, il n’y a pas de territoire où il n’y ait qu’un seul type d’Église: toute Église est en concurrence directe avec au moins une autre Église).
Ces trois traits ne sont pas rien, ils touchent au théologique, au socio-anthropologique, au politique. Ils sont des frontières nettes avec les autres christianismes et, hors de notre petite Europe ultra-minoritaire (où certaines Églises protestantes établies ont gardé un cérémonial proche du catholicisme et facilitent donc les allées et venues avec celui-ci), rendent difficile la fréquentation simultanée: on peut sans souci majeur passer d’une communauté protestante à l’autre, quelle que soit sa tradition et son orientation théologique. Ce sera plus difficile avec les autres christianismes dont les hiérarchies ont toujours un peu de mal à envisager la concurrence et la libre circulation entre troupeaux (4).
La simplicité de doctrine issue de la Réforme semble donc à la fois ce qui certes facilite la division (puisque chaque fidèle est pasteur·e en puissance) mais garantit l’unité de l’ensemble. En protestantismes, à l’inverse d’autres christianismes, ce n’est pas la doctrine qui est compliquée mais la pratique qui se décide et se négocie directement et difficilement entre l’individu et Dieu, principalement au moyen de la Bible et de la prière. Toujours en quête de dépannage, ces individus (comme tout automobiliste) ne regarderont pas à la marque affichée sur son garage par le mécanicien mais d’abord à son efficacité, sa disponibilité et son prix. Le but de ce dossier est de voir clients et mécaniciens à l’œuvre en ce début de 21e siècle.
Un panorama partiel et temporaire
Pour faire une sorte de point sur cet espace difficile à nommer mais qui selon nous existe bel et bien, nous avons fait appel comme pour le premier volet sur la religion en général publié il y a deux ans (5) à l’expertise du sociologue Jean-Paul Willaime. Parti dans les années 1970 des interrogations sur la «précarité protestante» et le devenir d’une religion souffrant «socialement d’un triple déficit: d’institutionnalité, de sacralité, d’universalité», il voit aujourd’hui ce qui pouvait apparaître alors comme des handicaps se transformer en atouts à l’heure de l’ultramodernité, caractérisée par la «crise générale des institutions» et «l’affaiblissement de leur pouvoir de régulation». Reprenant l’expression d’Alister McGrath qui qualifie le protestantisme d’«idée dangereuse» (puisqu’il «remet constamment en question l’institué chrétien»), il constate que cette idée «a impulsé une dynamique fructueuse de transformation ayant permis au protestantisme de s’adapter à un environnement changeant au cours des siècles et de se répandre dans différents continents». Le fort développement des études sur les expressions dites évangéliques depuis les années 1990 ne peut que confirmer cette tendance et en faire une sorte de paradigme puisque, «dans une situation socio-culturelle où le fait d’être chrétien est devenu un non-conformisme par rapport à un environnement séculier dominant, tous les chrétiens sont sociologiquement des évangéliques».
Passant du point de vue sociologique au point de vue théologique, Fritz Lienhard revient dans un entretien avec Frédéric Rognon sur cette rupture de système» dont il est témoin dans les Églises luthéro-réformées «des deux côtés du Rhin» et à propos de laquelle il a écrit le livre L’avenir des Églises protestantes. Il y voit l’occasion de creuser certains fondamentaux du christianisme parfois un peu oubliés par les formes les plus établies du protestantisme comme «l’expérience intérieure» et une individualisation qui après tout «est notre affaire». Une réflexion qui aboutit à des pronostics à la fois pessimistes pour «le dispositif tout entier des structures ecclésiales, qui ne survivront pas» et optimistes sur une «Église de demain» qui «sera sans doute plus aplatie» avec «des formes hybrides», «des groupes qui seront à la fois ecclésiaux et non-ecclésiaux» et forceront à «renoncer à fixer la limite entre le dedans et le dehors».
Viennent ensuite les études de terrain de deux jeunes sociologues hispaniques membres de l’ISOR (6) qui montrent bien que le protestantisme a changé de milieux. L’Espagne est en effet aujourd’hui, moins de 50 ans après la fin d’un franquisme ultra-catholique, un observatoire idéal des nouvelles formes d’Églises, ici en milieu diasporique africain et dans la société gitane. Des entretiens avec les deux chercheurs permettent d’étendre le champ de la réflexion au delà de ces terrains très travaillés et fertiles.
Pour le milieu diasporique africain, Rafael Cazarin part d’une observation de trois Églises de Bilbao, au Pays Basque espagnol (en particulier une Église dirigée par un couple nigérian apôtre-prophétesse), qu’il compare ensuite à trois Églises elles aussi migrantes mais sur le sol africain, à Johannesburg (elles d’origine principalement congolaise). Mais au delà des nationalités d’origine, ce qu’il constate quelle que soit la localisation est une «omniprésente architecture sociale d’Églises au sein d’un réseau pentecôtiste africain diasporique qui permet aux fidèles d’éprouver un sentiment d’appartenance dans des localités géographiquement éloignées». Les associations d’Église qui regroupent les fidèles par catégorie jouent un grand rôle dans ce processus puisque, comme l’explique un pasteur: «C’est pour ça qu’on organise ces groupes ; pour qu’ils sachent quel rôle jouer quand on est chrétien». Un rôle qui doit intégrer ces migrants «à la fois dans la communauté pentecôtiste charismatique et dans leurs sociétés majoritaires sécularisées» grâce à une moralité qui «lie ces communautés ensemble avec des valeurs partagées».
Pour la société gitane, le terrain arpenté par Antonio Montañés Jiménez a été madrilène: principalement 4 assemblées de l’IEF, la grande Église gitane espagnole qui «a remplacé l’Église catholique comme institution religieuse hégémonique» sur le modèle de la Mission évangélique des Tziganes de France (METz). Et, comme point de comparaison, l’Église indépendante Vino Nuevo fondée par un ancien pasteur de l’IEF qui «se définit comme multiculturelle» tout en restant à majorité gitane et bénéfice du soutien d’un «réseau transnational américain». Les deux types d’Église sont finalement deux stratégies différentes d’utilisation du «christianisme charismatique pentecôtiste pour gérer le changement culturel au sein de la population gitane» confrontée à des évolutions radicales depuis la deuxième moitié du 20e siècle. L’IEF, pour l’instant ultra-majoritaire et qui fonctionne de façon à la fois centralisée, collective et consensuelle, parie sur «une stratégie de résistance» et de renversement du stigmate dans une société toujours excluante. Alors que Vino Nuevo, qui fonctionne sur le modèle de l’autorité personnelle d’un pasteur rassemblant ses «partisans inconditionnels», promeut un «modèle rupturiste d’identité» avec une stratégie d’ouverture aux non-Gitans.
Deux aspects transversaux sont abordés pour finir, avec un rituel qui est toujours un marqueur important de protestantisme (même si les quakers ne le célèbrent pas) et un état de la réflexion académique francophone sur le pentecôtisme.
Durant la pandémie, la cène en ligne a été une réaction spontanée dans tout le monde protestant à l’impossibilité de se rassembler physiquement pour ce rituel. Beaucoup l’ont fait… et beaucoup ne l’ont pas fait. Mais la distinction ne suivait pas des critères théologiques ou sociologiques. Soupçonnant là quelque chose de plus anthropologique, j’examine d’abord dans cet article si nous pouvons retrouver dans des textes anciens ce que ressentaient les fidèles pendant ce rituel. Le riche chapitre sur la cène dans l’Institution de Jean Calvin et l’étrange histoire de la grève de fait menée par les fidèles du 18e au 20e siècle dans les Églises réformées francophones peuvent certainement être utiles puisqu’ils semblent pointer trois sentiments positifs (éveil, plaisir, extase) et un négatif (crainte). J’expose ensuite les premiers résultats d’un questionnaire en ligne sur la cène pendant la pandémie chez les protestants francophones. Qui montrent une nette distinction entre les fidèles qui ont besoin ou pas de la communion mais pas seulement: interprétation théologique, sensations (et quelles sensations), pratique en ligne… il n’y a pas de consensus sur la cène entre les protestants. À part le fait que désormais tout le monde la prend.
Quant aux trois livres récents écrits par des chercheurs francophones sur les pentecôtismes (Émir Mahieddin, Yannick Fer et Gwendoline Malogne-Fer), ils permettent de se rendre compte que si les limites de cette mouvance sont aujourd’hui si difficiles à définir, c’est peut-être qu’elle est devenue paradigmatique de la «nébuleuse» protestante définie par Hubert Bost comme un «espace religieux dont on peut repérer le ou les centres, mais non circonscrire les frontières» (7).
Les protestantismes du 21e siècle dans Foi&Vie depuis 2020
Protestants pour (ou contre) l’Europe ?: dossier du n°2020/1 avec un tour d’horizon des attitudes politiques vis à vis de la construction européenne dans les différents milieux protestants, des aperçus de la situation en Allemagne et en Italie, un entretien avec Jean-Arnold de Clermont et une réflexion d’Olivier Abel sur l’ethos européen et le scepticisme.
Dans le dossier du n°2020/2 Paroles de confinés, un tour d’horizon sur L’Église au temps du confinement avec des réactions du monde protestant dans le monde, de la Chine à l’Italie, Singapour, l’Allemagne, la Namibie, Hong Kong, la Hongrie et l’Australie. Plus des aperçus de ce qui se passe en catholicisme et orthodoxie (États-Unis, Grèce).
Dans le Cahier du christianisme social Face à la crise écologique (n°2020/3), trois articles rappellent et analysent la lente prise en compte de cette problématique dans le protestantisme français : Petite histoire critique d’une prise de conscience, Chute originelle et crise écologique, Mort et vie de l’écologie au sein du protestantisme français.
Le Cahier biblique Humanités numériques du n°2020/5 revient en fin d’année sur les brutaux changements techniques en cours pour cause de pandémie de Covid et d’interruption forcée des services présentiels avec un article sur L’Église hybride et un autre sur Les moyens vidéo et numériques au service de la transmission du culte.
L’année suivante, le dossier sur La diversité des ministères en Église (n°2021/4) s’intéresse directement aux évolutions récentes du côté des desservants dont la mixité femmes-hommes dans le ministère pastoral, le diaconat et le ministère de la réconciliation dans les Églises multiculturelles.
Depuis le numéro 2021/5, Foi&Vie a publié dans chacun de ses numéros les thèses et retranscriptions des débats entre théologiens issus des diverses facultés protestantes francophones lors des Rendez-vous de la pensée protestante de 2020 (1, 2, 3 et 4) et 2021 (1, 2, 3 et 4) sur l’autorité des Écritures.
Le premier Cahier d’études missiologiques et interculturelles (n°2021/6) expose les éléments du débat sur les Prosélytismes … au pluriel et ses incidences sur les relations entre christianismes. Le cahier comprend aussi le premier volet d’un article sur le prosélytisme protestant en islam, et le numéro deux articles sur les réformes dans l’Église d’Angleterre et le débat sur le culte et la cène en ligne aux États-Unis.
Le deuxième Cahier d’études missiologiques et interculturelles (n°2022/2) sur les Chrétiens d’Orient permet d’aborder plusieurs aspects des protestantismes des Proche- et Moyen-Orient, par exemple avec la première pasteure dans la région, la libanaise Rola Sleiman. Le numéro comprend également le deuxième volet de l’article sur le prosélytisme protestant en islam.
Le Cahier d’études juives (n°2022/4) sur les relations entre Chrétiens et Juifs, en plus du bilan du dialogue officiel international depuis 2000, comprend une enquête sur ce qu’il en est concrètement entre Protestants et juifs en France aujourd’hui.
Dans notre précédent dossier (n°2023/1-2) consacré au centenaire de la Fraternité Spirituelle des Veilleurs, plusieurs textes évoquent l’actualité de cette spiritualité particulière en protestantisme, en particulier son renouveau à partir des années 1990 et ses développements en Suisse et en Belgique.
Illustration: culte de sainte cène dans une assemblée pentecôtiste de Cotonou (Bénin) en septembre 2023.
(1) Les dernières projections démographiques du Pew Research Center voient 31 % de chrétiens dans le monde en 2050 tout comme en 2010. À part les hindous qui devraient rester eux aussi à 15% (et les Juifs à 0,2%), les autres religions et convictions soit chutent (les non-affiliés religieusement de 16 à 13%, les bouddhistes de 7 à 5%, les religions traditionnelles de 6 à 5%), soit progressent rapidement comme l’islam (23 à 30 %). Mais la trajectoire de celui-ci devrait, du fait du ralentissement démographique en cours dans les pays musulmans, décélérer ensuite et progresser à peu près au même rythme que le christianisme que Pew voit passer à 32 % (comme l’islam) en 2070, à 34% en 2100 (l’islam étant alors à 35%). Les projections démographiques étant fréquemment réévaluées (on a eu plutôt tendance récemment à sous-évaluer la brutalité de la transition démographique en cours et la chute de la fécondité un peu partout dans le monde) et les tendances religieuses étant impossibles à prévoir, on prendra bien sûr tous ces chiffres avec de grosses pincettes. Voir The Future of World Religions: Population Growth Projections, 2010-2050, Pew Research Center, 2 avril 2015. Pew ne publie pas de prévisions sur la répartition entre chrétiens mais donnait 37% de protestants au sens large en 2011, tout comme la World Christian Database en 2018 (contre 50% de catholiques et 12% d’orthodoxes et orientaux).
(2) Chiffres issus de la brochure Global Christianity de 2011 par le Pew Research Center.
(3) On aurait pourtant tendance à penser que le vocable évangélique, servant déjà à désigner les luthériens d’Europe centrale, presque tous les types d’Églises non-catholiques dans le monde hispanique et des Églises en phase de dynamisme dans les mondes anglophone et francophone, il a plus de cartouches que les autres pour désigner cet ensemble certes gazeux mais pas si disparate que ça.
(4) Cette différence apparaît bien dans le débat sur le prosélytisme, perçu comme naturel en protestantismes mais menaçant dans les autres christianismes. Voir l’article de Jean-Renel Amesfort: Perception du phénomène du prosélytisme dans des pratiques ecclésiales contemporaines, Foi&Vie 2021/6, pp.25-32.
(5) Quelle religion au 21e siècle ?, Foi&Vie 2021/5.
(6) L’ISOR (Investigacions en sociologia de la religió, Recherches en sociologie de la religion) est un institut spécialisé de l’Université autonome de Barcelone fondé en 1974 par Joan Estruch et dirigé depuis 2014 par Mar Griera que nous avions interrogée dans le précédent dossier: «La religion est en transformation plutôt qu’en voie de disparition».
(7) Hubert Bost, Protestantisme: une naissance sans faire-part, ETR 67/3 (1992), p.371.