« Moins une démocratie faible qu’une société faiblement démocratique »
« D’une manière générale, l’année 1938 est marquée par une série impressionnante de décrets lois de plus en plus hostiles à l’accueil des étrangers, pénalisant l’entraide et facilitant les conditions de la déchéance de nationalité. Arendt voit dans cette politique des démocraties une forme de « contamination totalitaire ». J’en ai pris la mesure dans la presse de l’époque où, à quelques exceptions près, une xénophobie généralisée vient se greffer sur l’antisémitisme traditionnel de l’extrême droite. »
Interrogé par Eugénie Bourlet sur son livre Récidive. 1938 où il observe comment la presse rend compte de ce qui se passe cette année-là, le philosophe Michaël Foessel explique qu’il a choisi cette date car elle marque en France « une radicalisation du discours ». Si « rien ne se répète dans l’histoire à l’identique, ou même sous une forme similaire », il voit un parallèle avec notre période en ce qu’il s’agit alors comme aujourd’hui des « effets au long cours d’une crise générale du capitalisme sur la démocratie (1929 alors, 2007 pour nous) ». Comme les mesures « de plus en plus autoritaires » prises par une « République en danger » pour « faire face aux dangers venus de pays totalitaires et à la récession », « les mesures adoptées depuis une dizaine d’années en France en matière économique comme sur le plan sécuritaire ne constituent pas le meilleur obstacle à la montée des extrémismes nationalistes. Au contraire, elles rendent imaginables leur percée en accoutumant la société à ces solutions autoritaires ». « Mystique du travail », « présidentialisation du pouvoir », « demande d’autorité », « répression très forte », « refus d’accueillir de nouveaux réfugiés », « xénophobie généralisée », scepticisme face « aux faits », les parallèles ne manquent pas.
15 avril 2019