La maladie de Lyme ou la rupture entre médecins et malades
« Sur 301 personnes avec une maladie de Lyme présumée, 91 % avaient été exposées à des morsures de tiques et 51 % faisaient état d’une telle morsure. La moitié des patient·es avaient déjà été traité·es par au moins une cure de médicaments anti-infectieux. Dans cette série, le diagnostic initialement porté n’a pu être confirmé que chez moins de 10 % des sujets. Le traitement présomptif administré avait échoué dans plus de 80 % des cas, et 80 % des malades ont été diagnostiqué·es comme souffrant d’une autre maladie (psychologique, rhumatologique, neurologique ou autre). »
« Il s’agit pour les médecins, face à leur patientèle, de percevoir les signes, de porter un diagnostic et enfin de prescrire un traitement » : pour Jean-Yves Nau, ce triptyque fondamental de la « médecine occidentale officielle » est mis à mal par un « cas emblématique » comme la maladie de Lyme, « à l’origine d’une affaire édifiante qui voit s’opposer plusieurs chapelles et se dessiner bien des impasses ». Première difficulté, « l’hétérogénéité des symptômes » et le « caractère imprévisible de son évolution, plus ou moins entrecoupée de poussées et de rémissions ». Deuxième difficulté, le « nombre des bactéries pathogènes impliquées » et les « incertitudes quant à la fiabilité des examens biologiques utilisés pour établir un diagnostic ». Troisième difficulté, la vive controverse lancée par « des associations de patients, rejoints par quelques médecins et chercheurs et des activistes » qui affirment « l’existence d’une maladie chronique, distincte de la forme disséminée tardive de la maladie : le syndrome persistant polymorphe après une possible morsure de tique (SPPT) ». Un « ambitieux plan national de lutte contre la maladie de Lyme et les maladies transmissibles par les tiques » en 2016 s’est heurté à la division des spécialistes démontrée par la sortie presque concomitante cette année d’une étude montrant un important « surdiagnostic et surtraitement antibiotique » en France et du livre J’ai surmonté la maladie de Lyme préfacé par l’un des chercheurs les plus favorables à une reconnaissance officielle du SPPT.
6 juin 2019