« Gilets jaunes » : le (dés)intérêt général
« Cette puissance prêtée à un homme seul engendre une mortelle illusion : elle fait de lui un démiurge, alors qu’il n’est de plus en plus qu’un colosse aux pieds d’argile. La distance verticale qui s’instaure, faute d’intermédiaires crédibles, forge un hiatus entre l’État et la population. D’espoirs déçus en promesses non tenues, la frustration passe de l’indifférence blasée à la colère et à la rancœur. »
Le mouvement des Gilets Jaunes s’inscrit, pour Claude Patriat, à la fois dans un mouvement global d’érosion de la confiance dans la démocratie libérale et comme un signe de la crise française d’un « système institutionnel aussi ambigu que fatigué » : faute de pouvoir être un démiurge, le président devient vite un paratonnerre « sur lequel s’abattent les foudres réunies de la colère sociale et de la frustration politique ». Si tout le système pousse à un « usage vertical du pouvoir », c’est cet usage qui provoque en retour une contestation « amplifiée par la complaisance des médias en continu, contaminée par la surenchère des réseaux sociaux » et qui « dépasse le simple rejet d’une politique pour mettre en cause notre contrat social » et la définition de cet intérêt général sur lequel est théoriquement fondé l’État.
14 décembre 2018