Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour défendre l’Ukraine?
En regardant de loin avec un œil ému la démocratie qui fleurissait en Ukraine, l’Europe a chanté tout l’été. Mais pour Sylvain Cuzent, président de la Mission Populaire, si vis pacem para bellum, autrement dit: si tu veux la paix, prépare la guerre…
Texte publié sur Blog pop.
Sidération, incrédulité, colère, peur… Tels étaient les sentiments qui ont entouré l’invasion de l’Ukraine en février 2022. Depuis 1945, l’Europe, celle de l’Ouest au moins, vivait dans la certitude d’avoir, avec la construction européenne notamment, écarté définitivement tout risque de guerre.
Le plus jamais ça semblait à l’œuvre: oubliées la guerre froide et la crise des Pershing et SS20 des années 80, oublié le mur de Berlin démantelé au détour de la décennie 80-90… L’Europe de l’ouest, malgré la guerre en ex-Yougoslavie il y a 30 ans, paraissait sûre de sa recette: se parler pour ne pas s’affronter. L’armée dans ces conditions paraissait un vestige d’un autre âge.
Et puis patatras!
S’impliquer dans le conflit? Vous n’y pensez pas!
Voilà que l’ours russe, qui semblait contenu grâce aux concessions tchétchènes, géorgiennes ou en Crimée (sans parler de la Syrie), n’en finit plus de son appétit conquérant! Il revendique de régner sans partage sur ce qui fut l’empire russe puis soviétique. Les ambitions nationales ukrainiennes affirmées depuis 1991 et plus particulièrement depuis 20 ans, contrarient sa conception impériale pour ne pas dire impérialiste. L’Ukraine se veut souveraine, démocratique? C’en est trop: il fallait briser toute velléité émancipatrice et libérer le pays de dirigeants dangereux, qualifiés de nazis. Quant aux occidentaux qui seraient tentés de mettre leur nez dans ces affaires, la menace d’une frappe nucléaire les inciterait à rester à l’écart.
C’était compter sans la détermination et l’incroyable capacité de résistance ukrainienne. Bien que sa population soit trois fois moindre que la Russie, l’Ukraine lui tient tête avec courage et sens du sacrifice pour défendre sa liberté.
Nos pays d’Europe occidentale qui regardaient avec sympathie l’évolution démocratique de l’Ukraine se sont trouvés, comme la cigale de la fable, bien en difficulté après le 24 février 2022, face aux appels à l’aide du président Zelenski. Fournir des ambulances d’accord, accueillir des réfugiés pourquoi pas (ceux-là sont blancs et chrétiens de surcroît…), fournir des armes défensives ou de faible portée à la rigueur, mais des chars, des armes offensives, vous n’y pensez pas!… Ce serait nous impliquer dans le conflit (sous-entendu: qui ne nous concerne pas)…
Si vis pacem para bellum
Pourtant, on le sait maintenant, nos pays sont amenés jour après jour à calculer jusqu’où ne pas aller trop loin, à investir urgemment et massivement dans la production d’armement et à mobiliser leurs armées pour lesquelles les budgets n’ont jamais été si élevés depuis 80 ans.
Si vis pacem para bellum. Autrement dit, si tu veux la paix prépare la guerre semble revenu d’actualité. Jusqu’où? Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour défendre l’Ukraine, ou plus exactement pour contrer l’appétit de l’ogre de Moscou? Car c’est bien de cela qu’il s’agit aujourd’hui: défendre notre conception démocratique contre les tentations totalitaires du Kremlin qui pourrait bien vouloir nous faire payer le prix des chars.
Illustration: Volodymyr Zelensky et Ursula von der Leyen lors du sommet UE-Ukraine à Kiev le 3 février 2023.